Les histoires de l’ombre
Bienvenue dans ma nouvelle rubrique…
lire la suite de l'articleLouise épousa Lucien dans la petite église de son Jura natal, par une radieuse journée de juin 1914.
La mobilisation générale sonna le glas de leur amour, un samedi d’août de cette même année.
Louise fixa longuement la silhouette de son bleuet bien-aimé, aussi longtemps qu’il lui fut possible…
Il s’effaça, entre le ciel et les buissons bordant le chemin qui menait à Saint-Claude.
Pour tromper la douleur de l’absence, Louise travailla sans relâche.
Point de repos pour cette jeune femme de vingt ans à peine : il fallut s’occuper aux champs, nourrir le bétail…
Un mois, puis deux, puis d’autres identiques défilèrent sans nouvelles ; la peur et la faim tenaillaient le ventre.
Plus de larmes, plus de prières, juste un corps amaigri, un fétu de paille vidé de sa « substance ».
Louise se résigna à déposer l’alliance d’argent sur la table de nuit « peur de perdre dans le paillage de l’écurie le dernier lien la reliant au fil tragique de sa vie »...
L’hiver arriva vite, trop vite…
Louise l’avait pourtant bien sentie, cette morsure cinglante, sous son châle de laine, alors qu’elle charriait des tronçons de fayards sur le traîneau à bois.
Un matin de février 1915, une fièvre subite la cloua au lit.
Elle se laissa glisser sans volonté, dans un délire qui dura trois jours et trois nuits.
Une pneumonie foudroyante l’emporta.
Ses derniers mots furent pour Lucien son mari, volé par « La Der des Ders ».
Une modeste carriole cahota son cercueil jusqu’au cimetière.
Cette foutue guerre rendait les visages austères.
Lucien ne rentra jamais au village, « mort pour la patrie » citait la dernière correspondance.
Son corps ne fut jamais retrouvé, « transformé en chair à canon », marmonna son père Joseph, en serrant le billet de ses mains tremblantes : c’était son fils unique.
En mai 1916, la mort le faucha dans sa cinquante-troisième année : il se brisa le cou en tombant dans l’auge des cochons.
— L’avait trop bu ! racontèrent les doyens du village !
Durant ces quatre années terribles, plus de temps pour panser les plaies, ni pour penser aux morts :
— Ça remplit la tête et ça vide le ventre !
Ainsi se terminaient les histoires d’amour dans nos campagnes, durant cette maudite guerre.
« Souviens-toi l’été 1914 » MOINE Corinne
L’histoire de Louise et Lucien, s’inspire de faits réels.
« Il n’y a plus de noms pour ceux que la guerre a effacés — seulement les mots des vivants, qui les font renaître. »
MOINE Corinne
La Première Guerre mondiale fit s’entre-tuer des millions d’hommes pendant plus de quatre ans…
Combien de femmes ? L’Histoire ne le mentionne pas…
Dans les campagnes, les femmes remplacèrent les hommes enrôlés dans l’armée.
Elles contribuèrent à « l’effort de guerre », jouant un rôle social et économique au péril de leur vie.
Des héroïnes mobilisées pour soutenir la patrie, évaporées dans l’ombre des Poilus de la Grande Guerre...
Honneur à toutes ces femmes de l’ombre…
Belle découverte…
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Bonjour Corinne. Je viens de lire tes 3 textes. Très beaux malgré la cruauté. Toutes ces vies gachées. Ces destins brisés. Dans toute famille on a ces exemples. Mon grand père maternel est revenu gazé. Maman me racontait combien sa santé en avait pris un coup. Je viens de lire
un livre ces jours derniers sur le destin d’une femme pendant cette guerre. Je te le mets de côté
et quand nous ouvrirons dans quelques mois je te le passerais.
Nous traversons aussi actuellement une curieuse époque. Prend bien soin de toi
et au plaisir Corinne. Marie-Claire
Bonjour Marie Claire… J’ai eu la chance de connaître un peu mon grand-père paternel, par pur hasard j’ai trouvé sa fiche militaire dans les archives de l’Ain… Voilà donc un peu de sa mémoire conservée pour les générations futures ! Je te remercie pour ta fidélité, prends soin de toi aussi… et des abeilles ! À très bientôt. Corinne